Mon modèle de mère au foyer, non seulement fonctionne très bien, mais en plus est redoutable d'efficacité... Ce n'est pas moi qui le dis, enfin, si, mais moi d'il y a 10 années passées...

Bousculée mentalement, en manque de confiance en moi, mal aimée, mal baisée, débordée tout en étant trop souvent lascive, trompée, abusée professionnellement, utilisée par mes amies, rabaissée par ma famille... Il y a 10 ans, ma vie était franchement le bordel.

J'ai regardé cette photo de moi il y a 10 ans que ma fille a exhumé dans mon ordinateur et je me suis demandé si j'avais des choses à me dire en tant que moi il y a 10 ans...

Chère Carole de 2020,

Merci. Bravo. Je t'aime. Tu m'as sauvé la vie... Tu peux être fière de toi.

Je t'ai vu à l'oeuvre Gamine (oui, je m'appelle Gamine entre moi et moi même...). J'ai tout vu. J'ai bien regardé et je t'ai vu. Carole... Waouh. Chapeau. Tu as réussi à laisser derrière toi le père de tes enfants qui se foutait de ta gueule, toi la fille sans père dont c'était la plus grande peur et la pire hantise. Tu as sauvé ton honneur, tes valeurs et surtout l'image de toi que tu donnes à tes enfants pour qu'elles puissent construire une image saine d'elles même et de la mère. Tu as réussi à chasser tes démons en fuyant cet homme que tu aimais tant et qui te faisais tant de mal, depuis le début, dans ton dos... Le père de tes enfants. Celui que tu avais choisi pour toute ta vie, celui qui devait élever le fruit de tout l'amour que tu lui as donné. Non seulement tu as réussi à le quitter, mais encore avec panache, avec classe et avec dignité. Aujourd'hui, tu pourras toujours le regarder droit dans les yeux sachant que tu n'as strictement rien à te reprocher. C'est pire que traverser l'Alaska sans vivres pour toi et ça moi, je le sais. Et tu l'as fait... Tu as offert mieux qu'un père à tes enfants. Tu leur as offert l'amour et la paix, la quiétude et le respect. La dignité.

Tu as construit ton univers tout autour de tes enfants et as placé tes mains sous chacun de leur pas. J'ai vu la mère que tu t'es battu pour être et pour rester et tu as su forcer mon admiration et la vérité, j'aimerais trop te ressembler ! Tu t'es levé le matin, tu as été là à tous les instants, tu n'as ménagé ni ton énergie, ni ta joie, ni ta gentillesse et tu as emporté avec toi tous les enfants que la vie mettait sur ton passage comme un ilôt de réconfort sur terre, aussi bref soit-il. Pas un seul bébé qui a croisé ta route n'a manqué ton sourire ou ton clin d'oeil, ta grimace ou tes paroles de félicitations et de réconfort. J'ai vu le plaisir et la fierté que tu prenais à être une si belle belle personne et à cacher ta beauté physique et ta richesse matérielle derrière ta beauté de coeur. Ta dignité.

Je t'ai vu combattre ta propre mère... Oui, oui... J'ai tout lu et bien regardé. Tu sais qu'il n'y a pas pire que d'affronter sa propre matrice et qu'en plus de la difficulté se mêle souvent comme un goût d'inutilité et toi, je t'ai vu te battre et l'affronter avec tes mots, ton intelligence, avec ton amour pour Dieu et ta façon de la remettre à sa place et de tout faire pour la garder en même temps que tu l'envoies en l'air pour te permettre de respirer. Je t'ai vu parler de ta mère à tes filles sans jamais cacher ce qu'elle est, mais sans non plus l'incriminer. J'ai vu le lien que tu veux garder avec des gens qui, tu le sais, n'en ont plus rien à secouer depuis déjà longtemps, ni de la vie, ni des enfants, même de leur lignée... La vérité, moi à ta place, dix ans en arrière, je les aurais tabassé. Tu as tout mon respect.

Je sais tout pour Albert. Je sais ce qu'il c'est passé, je sais qui il est et ce que tu as refusé. Ma chérie... Ne pleure pas. Je sais. Sois heureuse. Tu l'as fait. Tu sais... Tu as aimé, pour de vrai. Gratuit. Comme tu es. Comme il est. C'est une très grande qualité. Tu as aimé. Wow... La beauté.

Je sais qu'il y a plein de moments, des tonnes de moments où tu as hésité... Mais chaque jour de chaque minute, de la façon que tu jugeais juste, tu as avancé, sans tricher, sans parader, sans haïr... Une fille à chaque bras, le sourire aux lèvres, ta seule parole comme arme de construction massive, tu as avancé, devant les yeux de tes filles, tu les as élevé.

Rends toi compte... Tu ne ressembles à personne, tu as traversé tout ce qu'ils redoutent tous de traverser et tu l'as vécu mieux qu'ils ne vivent leurs vies confortables eux même. Réalise. Pour moi, tu es un héros. Tu es d'une beauté insolente dans tes pulls de laine qui ont mille ans avec tes cheveux en bataille ! Tu nous fait l'affront de ne même plus faire semblant de te maquiller pour rester belle ! Tu rayonnes, tu chantes et tu danses toutes la journée là où ils ont envie de se suicider en ayant tellement plus que toi. Et encore à terre, piétinée, écrasée, humiliée, seule... Tu nous souris, sans cynisme, sans hypocrisie et sans méchanceté. Tu es un cas unique au monde. Des comme toi, je cherche... Sans vouloir te désespérer parce que j'ai vu que tu cherches aussi, mais ça ne doit pas exister.

Nos petits bébés grassouillets d'hier sont les jolies petites filles d'aujourd'hui, tu as fait traverser la vie à tes enfants en bas âge dans l'authenticité. En même temps que tu leur as donné une éducation solide, tu leur as offert ce cadeau qui t'as tant coûté : la simplicité. Tu as appris à tes enfants à être contente et à le rester. A ne pas se concentrer sur les biens matériels, à s'ouvrir aux autres, au monde et à chercher le rire, la joie et la paix... Tu dis souvent que tu as toujours été là pour tes enfants et que tu n'as rien raté, sans jamais mentionné qu'elles ont aussi toujours été là pour toi et qu'il n'y a aucun de tes éternuements qui n'a reçu deux "à tes souhaits" et aucune larme qui n'aient été entendu sans être immédiatement consolées à 4 mains.

Je t'ai vu être jalouse de la relation que tes filles partagent entre elles, toi qui rêvais d'avoir une soeur et je t'ai entendu en rire en secret... Tu aurais tellement aimé être leur soeur toi aussi pour pouvoir te mettre à leur niveau et aller jouer... Et en même temps tu connais la relation extraordinaire que tu as avec chacune d'entre elles et entre vous trois et tu sais bien que si elles sont si proche, c'est aussi parce que tu l'as bien cherché donc j'ai envie de te dire, bien fait.

Je suis la Carole Hofbauer de la photo... J'ai 29 ans. Je gère un site Internet sur la maternité. Je suis enceinte de mon deuxième enfant depuis quelques semaines. Je le sais, j'en suis très heureuse, je l'ai demandé ce bébé, je le veux. Je viens de me faire virer de mon poste de directrice pédagogique de l'ESJ Paris parce que je n'ai pas voulu coucher avec le président et faire la bonniche métisse de service que j'aurais dû jouer. Je n'ai pas été payé... Tout le monde s'en fout, l'histoire a tourné en ma défaveur, il paraît que je suis une femme horrible, rebus de l'humanité sur qui on peut cracher, chier et pisser. Mon mec ne me traite pas correctement. Je me demande de quel côté il est... Le sien, comme toujours sans doute. Je n'ai pas de compte en banque, je viens juste d'avoir des papiers en règle... Et puis il me trompe... Mais ça je ne le sais pas encore. Je vais le savoir dans une dizaine de jours... Ma fille a 2 ans. Je l'adore. Elle est tout ce que j'ai. J'ai des cheveux magnifiques, mais complètement dénaturé... Carole... Toi, la Carole Hofbauer de 2020, ne me juge pas trop durement et en regardant cette photo, ne vois rien d'autre que la mère de tes bébés. Tu les voulais, je suis allée les chercher, je me suis battue et je l'ai fait. Prends soin de mes enfants, mais tu sais comme j'ai confiance en toi maintenant que je t'ai regardé... Tu me remplie d'un sentiment qui mélange la dignité, la fierté et l'admiration. Quand je serais grande... Je veux être comme toi.

...Chère Carole Hofbauer de 2010,

je n'ai pas de mot pour t'exprimer ma reconnaissance. Tu es un exemple pour moi. Tu m'as tout appris, tu m'as tout donné. Merci pour la vie que tu m'as construites, je vais faire au mieux pour la magnifier encore. Reçois ma profonde gratitude et tout mon plus sincère respect.

Je t'aime de 2010.

Je t'aime en 2020