Ma grande fille de neuf ans et moi même traversons actuellement une phase un peu compliquée.
Après neuf ans de parfaite osmose et de fusion totale, voilà que Madame ma fille, ma passion, fruit de mon amour, chair de ma chair, se met à vouloir engloutir le monde… Elle veut partir en colonie, inviter ses copines au cinéma, acheter des vêtements ailleurs que dans les magasins pour enfants, passer l’après-midi à la patinoire et zaï zaï zaï…
Je vous avoue qu’avec leur père, nous avions pris le parti dès sa naissance de la pourrir gâter consciencieusement en lui donnant toujours tout ce qu’elle demanderait. J’ai donc conservé cette ligne de conduite, mais face à la précarité, nous avions toutes les deux évoluées, magnifiquement et elle est tellement gentille et arrangeante que j’ai fait l’erreur de m’y habituer…
J’ai arrêté de travailler pendant mes grossesses pour ne pas stresser et perdre mes bébés, mes filles ont été allaité 5 mois exclusif et 2 ans au total chacune comme le recommande l’OMS. J’ai rejoins un forum de mère pour apprendre tout ce que je sais sur l’accouchement, l’allaitement, le portage, le massage, le maternage… Quand j’ai rencontré des difficultés, j’ai consulté des spécialistes, pour mes filles comme pour moi. J’ai travaillé dur pour y arriver en subissant souvent une salve d’injures qui venait me doucher de la tête aux pieds quand je défendais mes convictions d’une maternité à respecter comme un métier. Cela fait 9 ans que je passe pour la « madame-je-sais-tout la mère-parfaite » et que je ne me retiens même plus de répondre que c’est-vrai-et-que-je-vous-emmerde-toutes-bande-de-connes-maltraitantes, mais -même si j’ai aimé le placer ici- ce n’est pas le propos… Simplement pour illustrer.
Impossible de combler ma fille dans ses demandes ce matin. Ma fille me demande d'aller vers les autres, de gagner beaucoup d'argent, de devenir adapté au système que je rejette et que j'ai réussi à contourner magistralement... Alors depuis ce matin, je bougonne et tempête de colère.
Je me suis alors vu expliquer à ma fille de 9 ans ce matin que, pour faire court, ses demandes me saoulent !!! Que je n’ai pas envie de me lever toute la semaine à 7h30 pour l’amener à l’école à sa demande (alors que je rêve d'une école à la maison) et enchaîner encore le week-end avec ses copines et son centre de loisirs, etc ! Que moi ce que je veux faire dans ma vie, c’est dormir !!! Et que j’ai le droit !!! Que tout ce qu’elle me demande, coûte de l’argent et que pour avoir cet argent ça me demande de faire des choses que je n’ai pas forcément envie de faire, que tout ça, ça fait passer le temps, mais en réalité, ça ne sert à rien ! C’est illusoire et que c’est rageant pour moi de ne pas arriver à lui expliquer en quoi et à quel point tout ça c’est de la grosse merde qui l’éloigne de l’essentiel : elle et sa plénitude !!!
J’ai conclu en lui disant que le problème ne venait pas d’elle et que c’était tout à fait normal qu’elle veuille tout ça et que c’est le contraire qui serait très inquiétant !Ma fille me connait parfaitement et comprend mes raisonnements.
Alors elle a ri et m’a répondu avec sa tête de soleil « Et oui ! »
Voyant que j’étais toujours aussi renfermée, elle m’a demandé
-Tu es fâché après moi ?
-Bien sur que non… Ce n’est pas ta faute. Je suis fâché après moi, toi tu n’as rien fait, je ne vais pas t’en vouloir d’être une enfant…
Alors elle a ri et a acquiescé, soulagée.
En réponse, j’ai invité trois de ses amies à venir me casser les oreilles cet après-midi chez moi. Ma maison est remplie de rire et de piaillements qui me font relire mes phrases 7 fois. On ira manger une glace qui me coûtera le prix des courses pour 3 jours et elles seront toutes heureuses et gorgées de souvenirs positifs.
C’est à moi de m’adapter à elles, encore et encore, comme je l’ai fait depuis qu’elles sont nées. C’est ce qui me sauve, me fait vivre, grandir et me surpasser. C'est ce que j'ai voulut et demandé quand j'ai commencé les "essais bébé"... Bb1... Bb2... Mes enfants, ma responsabilité, ma vie, mon utilité. Leur paix.
C’est à moi de me former pour la faire venir au monde dans la douceur et la joie, c’est à moi de me réveiller la nuit quand elle a peur, froid ou faim, c’est à moi de lui donner mon lait de mon corps, c’est à moi de lui donner la chaleur d’un foyer, une éducation et tout ce qu’il lui faudra pour devenir autonome, heureuse et en paix. Parce que c’est moi qui l’ai fait venir par mon corps et c’est moi qui l’ai accouché. C’est mon enfant, mon rôle au monde tel que je l'ai décidé à partir du moment où elle a respiré.
Quand je lis les nouveaux parents qui ne veulent même plus porter eux même leurs enfants, plus les allaiter, ni s’occuper d’eux la nuit ou la journée, j’ai envie de leur dire, par pitié, je vous en supplie, ne faites pas d’enfants. C’est un vrai métier, la maternité, il ne suffit pas de savoir le déléguer, il faut l’assumer, jour après jour, pour l’éternité.
Pas de retraite en maternité. Si tu n’es pas prête à vivre et à faire grandir toi même un enfant, par ton corps, ta tête, ton cœur, ton cul, par des choses qui te dépassent et que tu dépasseras pour eux, je t’en supplie, ne fais pas de bébé.
Si Dieu veut, tu trouveras bien de quoi t’occuper...