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Vocation : inclination, penchant impérieux qu'un individu ressent pour une profession, une activité ou un genre de vie.

Quand on a soi même vécu l'appel impérieux d'un métier, quand on a entendu dans ses entrailles la "voie" du travail à faire, quand on a vu la vocation naître en nous, alors on ne peut pas, jamais, éteindre la vocation de son enfant. Parce que c'est sacré.

Je suis de ces mères qui pensent que leur enfant a le droit de faire le métier qu'elle veut tant qu'elle est heureuse de le faire et de vivre. Je ne souhaite pas à mes enfants d'être riche, mais d'avoir une vie riche. Toute l'éducation que je propose est mise en place de sorte que l'enfant puisse être autonome, décisionnaire de sa vie et confortable dans son futur selon sa propre volonté.

Quand ma grande fille avait à peine 4 ans, elle a commencé à nous dire qu'elle voulait être factrice, que c'était son rêve. C'était ses mots. A la question quel métier tu voudrais faire plus tard, elle a toujours répondu "factrice !"

Ma mère en était ravagée et avait très peur du fait que non seulement je ne rectifiais pas la volonté de mon enfant, mais qu'en plus je la cautionnais ! Ma fille voulait être factrice et je n'angoissais pas. Bien au contraire, j'étais fière d'elle.

Vers 6 ou 7 ans on a commencé ensemble à se renseigner auprès des factrices sur leur quotidien, sur les conditions qu'il fallait réunir pour être une bonne factrice et à chaque fois qu'on abordait une factrice ma fille la regardait avec des paillettes dans les yeux comme si elle parlait à une star internationale. J'avoue que ça m'amusait beaucoup de voir son regard émerveillé sur ces femmes que peu de monde regarde en réalité et qui arpentent nos rues comme des ombres furtives tous les matins.

Vers 8 ans, nous avons décidé de faire un pas de plus vers son rêve et de téléphoner à La Poste pour savoir si mon aspirante factrice pourrait avoir accès au centre de tri ou faire un mini stage d'observation, mais malheureusement le projet n'a pas été validé par La Poste parce que ma fille était vraiment trop jeune pour eux et qu'ils n'avaient jamais eu ce cas à traiter, ils ont préféré décliner la proposition, ce que j'ai trouvé très dommage, mais compréhensible. Ils m'ont proposé de passer par son école pour organiser une sortie avec toute la classe à La Poste, ce que j'ai également tenté de faire avec le maître de ma petite qui n'a pas été intéressé par l'activité.

Ce qui était important pour moi, c'est que ma fille voit que quelque soit ce qu'elle voulait faire, j'étais là pour lui montrer la marche à suivre, sans la juger, simplement accompagner sa vie avec mon expérience.

En même temps que je lui apprenais comment devenir factrice, je lui expliquais le fonctionnement de La Poste, les possibilités d'évolution à l'intérieur des entreprises et que ce n'était pas parce qu'on commençait par un métier qui nous passionne qu'on ne pourrait pas s'intéresser aux autres métiers dans l'entreprise. A l'époque ça nous a également permis d'aborder les conditions de vie des petits salaires, des femmes qui choisissent de travailler à l'extérieur et de faire carrière comme salariée en étudiant les avantages et les inconvénients notamment en comparaison avec moi qui suis mère au foyer. Nous avons aussi abordé les différents salaires qui existent et qui impliquent différents modes de vie, mais aussi à travers sa propre expérience de réalité d'enfant précaire, des cas spécifiques qui sous des airs de déchéance aux yeux de certains, peuvent avoir des avantages insoupçonnés si on apprend à les vivre avec panache.

Je lui ai appris à s'adapter face à son désir et j'ai tenté de lui faire comprendre qu'il y a mille façons de délivrer des messages aux gens, tous les matins.

Un jour, après maintes tentative de forcer ma fille à répondre qu'elle serait docteure ou avocate, ma mère a quand même pris son courage à deux mains et m'a posé la question : ça ne te fait rien qu'elle veuille être factrice ? J'ai ri. Je lui ai répondu que d'ici qu'elle le soit, il n'y aurait peut être plus de courrier papier...

Ce n'est pas à nous de décider du métier de nos enfants. Le monde est aussi déjà à eux, nous sommes là pour les aider à s'y adapter en les priant de bien vouloir nous y faire une place aussi quand eux trouveront la leur que nous leur souhaitons sublime... C'est par contre de notre responsabilité de leur apprendre à y arriver correctement et sans heurts et savoir se diriger ensuite pour progresser sans cesse dans leur évolution. Parce que je pense que l'être humain est fait dans sa tête comme dans son corps pour progresser sans cesse.

Alors depuis quelques jours, quand ma grande fille, la future factrice me dit qu'elle veut faire du cinéma et rêve de devenir actrice... Je remballe mon dégoût, mes peurs, mes appréhensions d'envoyer mon enfant adorée dans ce monde merdique dans lequel moi même j'aime passer une tête et je mets tout en place pour lui permettre d'accéder à son projet, par le travail et les études, de la meilleure façon possible, en n'oubliant pas de lui partager le rêve d'Adèle*, 11 ans, comme elle...

*Adele Haenel

*Photo : Nour-Eddine Lakhmari, réalisateur, Rosélina, aspirante f.actrice.


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