Quand on a déjà fait un chemin, on peut mettre moins de coeur à le refaire encore une fois...

Et pourtant dans l'éducation des enfants c'est bien ce qui se passe. On fait un enfant, on avance avec cette enfant et quand le deuxième arrive on ne revit pas de la même façon cette route que l'on a déjà fait. En plus du fait que le deuxième bénéficie de l'expérience et de l'aide du premier bébé...

Je suis très fusionnelle avec mes deux filles et pourtant, grâce à Dieu, ma petite nous rappelle parfois à l'ordre pour se faire respecter et ralentir notre rythme. Un exemple tout bête, mais qui je trouve est très parlant : un jour, en aparté, ma petite dernière vient me voir pour se confier et m'explique que ça lui fait de la peine de ne jamais être celle qui a la télécommande et qui choisit les émissions. Mes filles ont deux ans et demi d'écart et nous regardons toujours la télévision ensemble, sauf si je dois m'absenter pour faire une petite course en bas de la Maison, elles se gèrent toutes seules maintenant. Je me suis donc retrouvé en face de la réalité de mon enfant qui n'arrive pas à exprimer sa voix dans notre démocratie familiale. Après réunion du conseil de famille, nous avons décidé de faire plus attention à notre toute petite et lui avons recommandé de nous notifier cette décision à chaque fois qu'elle voudrait regarder ses dessins animés. Depuis nous regardons beaucoup plus Gulli, mais la Maison est aussi plus équilibrée. Chacune d'entre nous fait des efforts pour supporter le programme télé de l'autre et nous tentons de faire en sorte que chacune ai son temps d'antenne.

Cette épisode de la télévision m'a rendu très fière de ma petite parce qu'elle a su se faire respecter de nous et surtout faire respecter son enfance et son envie de la vivre ! Depuis toujours ma petite fait beaucoup d'efforts pour se hisser au niveau de développement de sa soeur et reste très frustrée quand elle n'y arrive pas parce qu'elle ne possède ni sa motricité par exemple, ni son expérience. Elle veut tellement partager les moments de jeux avec elle que ça la rend très triste quand elle ne peut pas le faire pour une question d'âge ou d'aptitude...

En nous imposant le fait de supporter ses dessins animés comme elle supporte les séries de ma grande fille ou mes chaînes d'infos en continu, ma petite m'a donné une grande solution pour pouvoir l'éduquer correctement : ne pas oublier de lui faire vivre son enfance.

Depuis je fais plus attention à ce qu'elle puisse avoir des moments d'enfance à elle. J'écoute ses envies de sorties (parce qu'en plus ça fait du bien à tout le monde de la suivre dans ses envies de sortie en enfance), je prête une oreille attentive à ses idées de créations enfantines et du mieux que je peux (parce que l'enfance demande une très grande patience que je n'ai pas toujours avec tout le travail que j'ai à faire) je mets les pieds avec elle sur sa route enfantine. Je compte bien m'améliorer et être de mieux en mieux avec elle, à ses côtés dans son enfance, mais j'ai beaucoup de progrès à faire.

Et pourtant je sais bien que notre salut est là à toutes les trois et que plus on nourrit l'enfance de la dernière et plus on grandit toutes les trois. Parce que ma grande devient du coup plus responsable en étant solidaire de l'enfance de sa soeur même si elle même l'a déjà traversé... Et parce que moi, je reste et redeviens une mère aimante et attentive, attentionnée à son enfant, ce que je préfère être au monde.

Ma fille veut une Maison de poupée... Ou plutôt une maison pour sa poupée. Parce que sa poupée vient d'avoir un bébé... Et qu'on lui cherche un Ken. J'ai été tellement fière et heureuse de trouver un carton "Palais Impérial" dehors et de voir mon enfant s'illuminer comme un soleil quand je lui ai demandé si ça ne serait pas une bonne idée pour sa poupée... J'ai senti tout l'amour et la gratitude qu'elle avait parce qu'elle se sentait entendue, aimée et respectée dans son enfance, sa propre histoire...

Alors, même si je cours partout pour trouver à manger et survivre, j'espère que je vais pouvoir trouver tout plein de moments à nous pour pouvoir participer à ras bord à l'enfance de mes enfants... Parce que quand je fais ça, elle me fait confiance, elle se lie à moi et nous devenons complice. Son éducation n'est plus seulement un cadrage et un accompagnement, une protection et une instruction, ça redevient ces partages que l'on a naturellement avec le premier enfant avec qui on se découvre parent. Je m'évertue à devenir une maman après l'avoir déjà été depuis longtemps et c'est un exercice très compliqué... Je l'avoues.

Ce n'est pas facile d'apprendre à re-jouer comme jamais. Mais je le vois, je le sens, je le sais, c'est bien la clef du succés avec les puînés : ne pas oublier de jouer.